La fin ou le retour des classes sociales ?

TM n°2 1ES3 Kléber Janvier 2005

A RENDRE LE JEUDI 3 FEVRIER 2005

 

Objectifs : 1° Interroger la pertinence du concept de « classe sociale » dans nos sociétés contemporaines. 2° Apprendre à passer de l'information à l'argument et à trier des arguments.

Les termes ou expressions ou phrases qui sont en grisés, sont des passages difficiles sur lesquels il est fortement recommandé de s'arrêter, de faire des recherches dans un dictionnaire (français ou S.E.S.) voire d'échanger avec d'autres élèves de la classe.

 

Document 1 : « Avez-vous le sentiment d'appartenir à une classe sociale ? » 1966-1994

Source  : Atlas des Français, Editions Autrement, 2002, page 52.

 

Document 2 : L'émiettement du prolétariat

Le groupe ouvrier apparaît bel et bien comme le grand perdant de la crise et plus généralement des mutations industrielles. Il ne s'agit plus seulement de restructurations internes comme à l'occasion d'autres mutations techno-économiques. Non seulement son poids relatif dans la structure sociale décline depuis les années 1960, mais ses effectifs chutent significativement depuis 1975 (d'après la nomenclature des P.C.S.).

La remontée éventuelle des emplois industrialisés a peu de chances de correspondre à une reprise des effectifs ouvriers. Les ouvriers spécialisés sont les premières victimes, leur diminution est spectaculaire. Cependant, les ouvriers qualifiés voient leur nombre décliner sinon stagner. Les nouveaux « ouvriers requalifiés », recrutés de plus en plus sur B.T.S., sont issus, le plus souvent, d'autres milieux sociaux. On assiste à l'implosion des noyaux ouvriers typiques de la deuxième industrialisation française (entamée dès la Belle Epoque et les années 1920, développée dans les années 1950 jusqu'aux années 1970).

Le groupe ouvrier a ainsi perdu les figures de proue qui le structuraient socialement et symboliquement : les mineurs, depuis longtemps, plus récemment les sidérurgistes, les métallurgistes, les travailleurs de l'automobile aux effectifs fortement réduits, n'ont plus la place centrale qu'ils occupaient dans les années 1960. Même les collectivités ouvrières de certains grands services (les cheminots, les dockers) n'échappent pas au rétrécissement de leurs rangs et surtout à la déstructuration professionnelle.

Source  : Serge Bosc, « Stratification et transformation sociales », Nathan, 1993, p.189-191.

 
Document 3 : Les cadres achètent le travail de l'employée qui achète du pain

[…] En effet, il est normal que, en général, les dépenses des cadres soient deux fois plus fortes que celles des ouvriers, puisque ces derniers ont moins de moyens ; il est plus intéressant de constater que, rapporté à la taille du budget, certaines consommations prennent une place plus ou moins importante. C'est pourquoi on compare ici les coefficients budgétaire s , à savoir la part dans le budget total des différents postes de consommation. Relativement à leur budget, les ouvriers consomment ainsi presque 3 fois plus de tabac (+192 % par rapport au budget des cadres), 2 fois plus de pain, de volailles et de porc, moitié plus d'électricité, de bœuf, de charcuterie que les cadres, et un tiers de plus d'essence ; les cadres ont en revanche une prédilection certaine pour les réparations du logement (qui accroît la valeur du patrimoine immobilier), les remboursements des prêts de la résidence secondaire, les restaurants, les vacances, et les dons à la famille (postes qui représentent une part relative plus que double dans leur budget), et consomment 16 fois plus de services domestiques que les ouvriers. Les consommations différentielles permettent de constater qu'aujourd'hui encore, les moyens économiques des classes populaires servent à couvrir des besoins de base, et que le différentiel de niveau de vie à la faveur des cadres leur permet de s'approprier des biens et services élaborés inaccessibles aux autres catégories. Les consommations des cadres sont systématiquement orientées vers des services élaborés (ayant bénéficié depuis 10 ans souvent d'une défiscalisation ou d'aides publiques), susceptibles de développer ces « nouveaux métiers » (aide à domicile, services de proximité, etc.) qui sont le plus souvent vieux comme le monde. […] Les écarts repérés ici n'ont guère varié au cours des dernières décennies, si ce n'est qu'une certaine convergence est à l'œuvre pour l'alimentation, et qu'une divergence se constitue pour les vacances, les loisirs en tous genres, l'achat du temps de travail d'autrui. De cette façon, malgré les propos iréniques sur la fin de la rareté dans la société d'abondance, acheter le temps de travail d'autrui demeure le lieu des principaux clivages . A bien analyser les différences entre catégories sociales ou tranches de niveau de vie, il est évident qu'être 30 % au-dessus de la moyenne ou 30 % en dessous change profondément les profils de consommation et le bien-être qui peut en résulter. Certains affirment que la profondeur de la hiérarchie économique ne permet plus de récompenser l'effort à sa juste valeur. Aujourd'hui, 85 % des cadres partent en vacance pour 34 jours en moyenne par personne, et 56 % des ouvriers partent pour 21 jours (Bihr et Pfefferkorn, 1995) : les moyens économiques à la disposition des différentes classes sociales leur permettent de s'adonner à des loisirs clairement distincts. Il est possible d'argumenter que les ouvriers choisissent de ne pas partir en vacances, mais ce choix est la résultante d'une contrainte évidente : leur position économique moins favorable dans le jeu concurrentiel de répartition marchande des biens les plus valorisés.[…]

Source  : Louis Chauvel, « Le retour des classes sociales ? », revue de l'OFCE n°79 octobre 2001.

Document 4 : Le processus de moyennisation

Dans les décennies 1960-1970, l'attention des sociologues français se portait plutôt sur les catégories ouvrières (la montée de la société de consommation conduirait-elle à leur embourgeoisement  ?) ou paysanne (leur diminution et les transformations concomitantes de leur métier signifiaient-elles la disparition d'une classe sociale ?).

Le diagnostic était celui d'une « moyennisation » de la société française, à entendre non pas comme un nivellement général mais comme sa centration progressive sur les classes moyennes. Dans cet esprit, les « classes moyennes » doivent être comprises comme la catégorie des « professions intermédiaires » (ex-« cadres moyens »), une partie des « cadres supérieurs » (notamment les enseignants du secondaire) et aussi des « employés ».

Cet ensemble pouvait apparaître comme l'élément le plus dynamique de la société française, source de nombreuses innovations et de changements. Son expansion sur le plan démographique était la plus forte. De plus en plus de Français se considéraient comme faisant partie d'une classe moyenne. Il était à l'origine de nombreux changements dans les mœurs, appelés à se répandre dans toute la société […] Tout un réseau d'associations, la mise en place de nouvelles formes de sociabilités permettaient à certains de leurs membres d'occuper progressivement des positions de notables. Le rôle et la place des catégories supérieures (bourgeoisie classique, dirigeants) en semblaient réduits. L'analyse s'écartait fortement des modèles plus classiques, d'inspiration marxiste ou wéberienne dans lesquelles les positions élevées combinent revenu, prestige et pouvoir et constituent l'élément dominant de la société.

Source  : Olivier Galland et Yannick Lemel, « La nouvelle société française », Armand Colin, 1998, p.32-33.

 

Document 5 : L'évolution des inégalités en France selon le baromètre des inégalités.

Source  : http://www.bip40.org

 

Document 6 : Des inégalités moins criantes

Sur le long terme, la distribution des revenus est devenue beaucoup moins inégalitaire. Les écarts d'aujourd'hui sont sans commune mesure avec ceux du XIXè siècle, ceux par exemple qui, d'après les comptes précis de Balzac, séparent les revenus d'Eugénie Grandet des revenus de « la grande nanon », sa servante. Les écarts en matière d'instruction se sont aussi considérablement réduits. L'élévation du niveau général d'instruction a été continue et elle s'est fortement accélérée après la Seconde Guerre mondiale. Cette évolution s'est accompagnée d'une réduction de l'inégalité des chances devant l'enseignement, observable dans les différents pays après 1945, tant au niveau de l'enseignement secondaire qu'à celui de l'enseignement supérieur. La répartition des niveaux scolaires au sein de la population s'est transformée, elle a évolué dans le même sens que la structure des revenus : le gonflement des catégories moyennes.

Il faut noter également une autre ligne d'évolution : le déplacement des inégalités économiques. Autrement dit, la portée des inégalités économiques s'est sensiblement modifiée à travers le temps : à quelques générations de distance, un même degré d'inégalité de revenus a changé de traduction concrète. La raison essentielle tient à l'élévation du niveau général du niveau de vie. La translation vers le haut de l'ensemble de la distribution des revenus a eu pour effet, au moins en ce qui concerne la très grande majorité, de reporter les inégalités bien au-delà de la sphère des besoins élémentaires.

Source  : Philippe Bénéton, « Les classes sociales », PUF, 1997, p.110-111.

 

Document 7 : Chômage et CSP

En %

Taux de chômage

CPIS

3,8

PI

5,4

Employés

10,5

Ouvriers

11,4

Source  : Enquête Emploi, INSEE, 2002.

 

Document 8 : Précarité et exclusion

A un pôle, la classe propriétaire des biens mobiliers et immobiliers ne cesse de s'enrichir puisque les revenus issus du patrimoine ont augmenté plus vite au cours des années 1980 que ceux qui sont issus des salaires. Selon l'INSEE, moins de10% des ménages possèdent 54% du patrimoine national et 28% des revenus annuels, tandis que la moitié la plus pauvre de la population ne détient que 6% du patrimoine et reçoit moins du quart des revenus. Plus encore, 1% des ménages les plus riches possède près de 20% du patrimoine.

A l'autre pôle se situe la classe ouvrière, les employés et tous les exclus du travail dont le nombre ne cesse de croître en période de crise. D'abord, exclus du travail, ces travailleurs deviennent bientôt des exclus sociaux s'ils ne retrouvent pas d'emploi. Nombre de jeunes issus de la fraction la plus basse de la classe ouvrière ne connaissent que les emplois de courte durée mal rémunérés et pénibles. Etienne Balibar (philosophe et sociologue marxiste contemporain) parle de la «  reproduction intergénérationnelle de la précarité » qui fonderait le remplacement de la notion d'inégalité par celle d'exclusion. Ainsi, l'exclusion deviendrait, comme hier l'inégalité, un phénomène structurel . Ce qui est plus qu'une hypothèse si l'on considère le caractère durable de l'exclusion structurelle (à la différence des précédentes crises) : développement de la pauvreté en Europe et aux Etats-Unis malgré un taux de croissance économique positif.

En France, 400 000 « sans domicile fixe », plus de 3 millions de chômeurs enregistrés (en 1995), sans compter les bénéficiaires du Revenu Minimum d'Insertion et les chômeurs non enregistrés, appartiennent à l'armée industrielle de réserve décrite par Marx.

Source  : Jean-Pierre Durand, « Sociologie de Marx », La découverte, 1995, p. 101-102.

Document 9 : Les classes sociales au début du XXè siècle

Nous ne serons jamais assez reconnaissants à la Révolution Française de nous avoir donné l'égalité civile et l'égalité politique. Elle ne nous a pas donné l'égalité sociale. Les hommes de ce temps n'ont pas prévu, ne pouvaient guère prévoir cette espèce de pseudo-aristocratie qui se fonda presque aussitôt sur les ruines de l'ancienne et acheva de l'abolir en la supplantant : la bourgeoisie moderne […]

Nous n'avons plus de castes, nous avons encore des classes. Une caste est fermée : on y naît, on y meurt ; sauf de rares exceptions, on n'y entre point, on n'en sort pas davantage. Une classe est ouverte, a des « parvenus » et des « déclassés ». […]

Une caste est une institution, une classe n'a pas d'existence officielle et légale. Au lieu de reposer sur des lois et des constitutions, elle est toute entière dans l'opinion et dans les mœurs. Elle n'en est pas moins une réalité sociale, moins fixe, il est vrai, et moins définie, mais tout aussi positive qu'une caste. On reconnaît un bourgeois d'un homme du peuple rien qu'à le voir passer dans la rue. On ne confond point un « Monsieur » avec un « homme », et encore moins une « Dame » avec une « femme ».[…]

La démarcation d'une classe est aussi nette que celle d'une caste ; seulement elle est franchissable. Rien au contraire n'est plus fréquent que le passage de la classe populaire à la classe bourgeoise. Sur dix bourgeois pris au hasard, cinq au moins sont des fils ou petits-fils d'ouvriers, de paysans, de boutiquiers, de concierges, de subalternes . Qui a su prendre les mœurs de la bourgeoisie est bourgeois.

Source  : E. Goblot, « La barrière et le niveau », 1925, PUF, 1980.

Document 10 : Temps de rattrapage

Rapport du salaire cadres/ouvriers

Croissance annuelle moyenne du pouvoir d'achat du salaire ouvrier %

Temps de rattrapage (années)

1955

3,9

4,8

29

1960

3,9

2,8

49

1965

4,0

3,5

40

1970

3,8

3,7

36

1975

3,4

3,5

35

1980

2,9

1,6

65

1985

2,7

0,3

371

1990

2,8

0,3

353

1995

2,6

0,3

316

2000

2,5

0,6

150

Source  : Louis Chauvel, in « Le renouveau d'une société de classes », Sous la direction de Paul Bouffartigue, Ed. La Dispute, 2004, page 59, d'après INSEE.

Lecture  : en 1955, le salaire moyen des cadres est 3,9 fois plus élevé que celui des ouvriers ; de 1950 à 1955, le taux de croissance annuelle du pouvoir d'achat du salaire ouvrier était de 4,8% par an ; à ce rythme, le temps nécessaire pour rattraper le pouvoir d'achat du salaire des cadres de 1955 est de 29 ans.

 

Document 11 : Qui sont les ouvriers aujourd'hui ?

A l'époque de Marx, on pouvait assimiler sans hésitation les notions de « prolétaire » et de « classes ouvrières ». En 1850, la classe ouvrière correspondait grosso modo à tous ceux qui vendaient leur force de travail et que l'on opposait aux paysans et aux propriétaires. Le lot commun des ouvriers était l'exploitation forcenée, la précarité de l'emploi et la misère… […] Mais comment raccorder cette définition de la classe ouvrière à la société contemporaine ? […] Les frontières de la classe ouvrière doivent-elles s'étendre à tous ceux qui vendent leur force de travail, c'est-à-dire l'ensemble des salariés ? Cela représente 85% des actifs… Faut-il s'en tenir aux seules catégories « populaires », à savoir les ouvriers et les employés (le travail et le revenu d'une caissière de supermarché sont peu différents de ceux d'un tourneur), soit les deux tiers des actifs ? Faut-il restreindre aux ouvriers stricto sensu (c'est-à-dire les travailleurs manuels de l'industrie) : ils ne comptent plus que pour 26% des actifs…

Source  : A. Weinberg, Sciences humaines, Hors série n°10, sept.-oct. 1995.

 

Document 12 : Extrait de « Retour sur la condition ouvrière »

Les « ouvriers » ont, d'une certaine manière, disparu du paysage social  ; désormais, lorsqu'on va à leur rencontre, c'est soit pour faire revivre la « mémoire ouvrière », soit pour étudier, avec inquiétude et dans la précipitation, « l'énigme » du vote ouvrier en faveur du Front National. Bref, les ouvriers existent, mais on ne les voit plus. Pourquoi ? Le processus de réhabilitation de l'entreprise à l'œuvre depuis le début des années 1980, qui a étroitement coïncidé avec les « adieux au prolétariat » de nombreux intellectuels « marxistes », a fait apparaître les ouvriers comme obstacles à la modernisation de l'industrie, comme les héritiers d'un passé révolu, menant nécessairement des combats d'arrière-garde . Progressivement et insensiblement, ils ont quitté l'horizon mental des faiseurs d'opinion (intellectuels, journalistes, hommes politiques, etc.), et cela au moment où, en raison même de l'affaiblissement des formes de résistance collective , le travail s'est intensifié dans les ateliers, où les relations sociales ont été pour ainsi dire transformées en simple variable d'ajustement, réduits à une composante de la masse salariale qu'il faut comprimer toujours plus.[…]

Leurs porte-parole (les syndicats ouvriers, les délégués de l'usine, les militants associatifs, le « Parti »), qui avaient vocation à les représenter dans l'espace public, ont considérablement perdu de leur influence. L'image que le groupe ouvrier faisait de lui-même s'en est trouvé ternie.

Source  : Stéphane Beaud, et Maurice Pialoux, « Retour sur la condition ouvrière », Fayard, 1999.

 
Document 13 : Retour aux inégalités d'accumulation

[…] La courbe de répartition des revenus est traditionnellement marquée par des écarts relativement faibles par rapport à ce que l'on observe du côté du patrimoine ; c'est particulièrement vrai dans une société «salariale» où le salaire est une source majeure de revenus encadrée par des grilles propices à un contrôle et à un compromis entre les différentes catégories de travailleurs de façon à réduire les inégalités les plus choquantes pour les acteurs sociaux. Le rapport interdécile y est de l'ordre de 4 en France, 3 pour les pays d'Europe du Nord, 5 aux États-Unis. Les rapports interdéciles du patrimoine sont immenses, d'un ordre de grandeur incomparable, de l'ordre de 70. Ils sont même inexprimables, puisqu'il faut prendre en considération les biens durables (automobile, machine à laver, etc.) pour obtenir un premier décile supérieur à zéro : il vaut alors environ 15 000 francs, le prix d'un petit scooter neuf ; sinon, hors biens durables, près de 20 % de la population n'a simplement aucun patrimoine, ce qui fait du rapport interdécile une grandeur assez abstraite. Lorsque l'on s'intéresse au patrimoine, les écarts deviennent ainsi des gouffres : sur ces strobiloïdes , en supposant que, entre la base et la médiane , l'écart est de 1 mètre, le décile supérieur du revenu est à 2 mètres, alors que celui du patrimoine est à 4 mètres. Côté revenu, à gauche, Lindsay Owen-Jones (le P.-D.G. de L'Oréal), qui a la réputation d'être le salarié au revenu le plus important en France, se trouve à une altitude de 300 mètres. Liliane Bettencourt, héritière de la société L'Oréal, de par son patrimoine, se retrouverait côté droit à 32 000 mètres. Cette hauteur stratosphérique signale bien évidemment que l'échelle, qui n'est que de un à trois comme pour les salaires, de un à quatre comme pour le revenu par tête, est de un à soixante-dix, voire plus, pour le patrimoine accumulé. […]

Source  : Louis Chauvel, « Le retour des classes sociales ? », revue de l'OFCE n°79 octobre 2001.

 

Document 14 : Evolution des modes de vie des ménages cadres et ouvriers

% Au moins une fois dans le dernier mois

Cadres supérieurs

Ouvriers

 

1973

1997

1973

1997

Fréquentation musée

56

65

25

24

 

Sorties au cinéma

82

82

78

44

 

Source  : M. Verret, La culture ouvrière, Paris, ACL Editions, 1988.

 
Document 15 : Classes sociales sans conscience ?

[…]Il est indubitable qu'entre 1949, où 40 % des salariés étaient syndiqués et aujourd'hui, où ils ne sont plus que 10 % , une perte de mobilisation est évidente. Au long des Trente glorieuses, le P.C.F. a représenté de 20 à 25 % des votes, contribuant à une activation permanente de la classe ouvrière. A 30 ans de distance, tout cela évoque un monde englouti. Pour autant, il est difficile de dire que le vote cesse de discriminer socialement les différentes classes sociales. D'abord, le non-vote est devenu un élément central du comportement électoral populaire (Héran, 1997) ; ensuite, si l'on suit les travaux de politologues du C.E.V.I.P.O.F. (Centre d'études de la vie politique française), l'ajout du vote F.N. à celui du vote P.C.F. permet, tout au long des années 1980 et 1990, de discriminer clairement un vote « bourgeois » (gauche et droite « centristes ») et un vote populaire (plus critique, voire radical ou porté aux extrêmes), et ce aussi bien que naguère (Boy et Mayer, 1997) ; enfin, un certain nombre de confrontations électorales ont donné lieu à des clivages extrêmement clairs, comme pour le « oui » au référendum sur le traité de Maastricht, qui dépassait 70 % chez les cadres et n'atteignait pas 35 % chez les ouvriers. L'homogénéisation parfaite du comportement politique des classes sociales est loin d'être atteinte.[…]

Source  : Louis Chauvel, « Le retour des classes sociales ? », revue de l'OFCE n°79 octobre 2001.

 

Document 16 : Dans les beaux quartiers

Mme de Quesnay, parlant du mariage de ses trois filles et du sien propre [...] renvoie au destin comme principe explicatif ultime. « Tous, c'est le jeu du hasard, le hasard total. L'aînée, qui a épousé un d'Arsonval, famille que nous connaissions depuis toujours, a été invitée à une chasse, mais elle n'avait pas de moyen de transport pour s'y rendre. Et tout simplement quelqu'un lui a dit : "Mais téléphonez à Hubert d'Arsonval", et voilà ! »

Quant à la deuxième, « c'est encore plus drôle. Elle revenait de Chine, il y avait un grand mariage au Jardin d'acclimatation, elle nous a accompagnés bien qu'elle ne soit pas invitée à ce mariage. Paul de Berseville avait 33 ans et ma fille 23. Paul de Berseville avait été obligé par sa mère à aller la représenter à ce mariage. Donc cela a été le plus grand des hasards ! »

Pour la troisième, "c'est pareil". Elle a connu son mari, originaire de la grande aristocratie belge, à un réveillon organisé par Mme de Quesnay au château familial, alors qu'il n'était pas invité et qu'il était venu accompagner une cousine de celle qui allait devenir sa femme.

Quant à M. et Mme de Quesnay, « c'est encore très drôle, c'est vraiment le destin. Je suis allée avec mon frère à une réception de l'ambassade de Belgique. Nous nous ennuyions, quand tout d'un coup mon frère tire sur une queue-de-pie et dit : "Qu'est-ce que tu fais là mon vieux Guillaume ?" Son vieux Guillaume était un copain d'enfance, ils se connaissaient depuis des années, ils avaient été en classe ensemble, et alors le vieux Guillaume, il connaissait toute la famille, sauf moi, il ne savait même pas que j'existais... et puis voilà ! [...] C'est vraiment le hasard, moi je ne le connaissais pas du tout et lui-même ignorait mon existence. »

Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, «  Dans les beaux quartiers », Éd. du Seuil, coll. « L'épreuve des faits », 1989, p. 190.

 

 

Synthèse  : Après avoir étudié chacun des 16 documents, construisez un grand tableau (sur une feuille A4 – paysage) avec 2 colonnes. Dans la première, vous rassemblerez tous les arguments qui prouvent la fin des classes sociales et dans la deuxième colonne, tous les arguments qui prouvent un retour des classes sociales .

 

Chaque argument doit être rédigé, chiffré si possible, et suffisamment explicite afin que le lecteur n'ai pas à se demander pourquoi il est dans telle ou telle colonne.

Argument / information, une même information peut donner lieu à 2 (voire plus) arguments différents voire contradictoires.

Dans certains documents, l'argument est déjà formulé par l'auteur du texte, dans d'autres, il n'y a que l'information et c'est donc à vous d'en faire un argument.

Si l'information est la munition, l'argument est le canon, la façon (direction, puissance) avec laquelle vous envoyez l'information…

 

Auteur : marjorie.galy@wanadoo.fr