La création monétaire et son contrôle

 

 

D'aprés : « Économie et histoire des sociétés contemporaines : cours et sujets corrigés », sous la direction de Marc Montoussé, Classes préparatoires voie économique, 1 ère et 2 ème années, Bréal, 2001, pages 226 et suivantes extrait d'un article de Pierre-André Corpron.

 

 

Qui crée la monnaie et comment ? Réponse délicate, création mo est un PROCESSUS souvent considéré comme mystérieux par les profanes. La réponse est que les banques créent de la monnaie à partir de rien ( ex nihilo ) et elle est largement contraire à l'intuition.

 

Une fois compris le mécanisme de création mo (par l'octroi de crédits) une deuxième question se pose immédiatement : comment le contrôler ? Comment éviter que la création mo ne s'emballe ?

 

Image erronée spontanée  : la planche à billet (et des stocks d'or (Fort Knox, EU, Kentucky, totalement erronée). Billets et pièces en France en 2003 ne représentent que 10% env. de la monnaie en circulation.

 

D'autres agents disposent du pouvoir de créer de la monnaie : les 90% restants (monnaie scripturale)

(BC crée de la monnaie lorsqu'elle opère la conversion de devises étrangères en €, émet des billets. Le trésor public s'occupe de la fabrication de la monnaie divisionnaire.)

 

Banques de second rang (ou banques commerciales : ex LCL, BNP, Crédit Agricole, La Poste…) sont celles qui créent l'essentiel de la monnaie en circulation par l'octroi de crédits, elles créent la monnaie scripturale que l'on peut aussi appeler monnaie bancaire.

 

A quoi servent les banques ? (page 77 doc 13, Nathan, PES)

La création mo des banques commerciales est liée à leurs activités de crédit. Les banques commerciales ne se contentent pas de prêter les sommes collecter auprès des agents qui déposent des liquidités (comptes courant et épargne). Elles ne seraient dans ce cas que des intermédiaires entre prêteurs et emprunteurs (adéquation montants et durée). Les banques commerciales ont un pouvoir de création monétaire, c'est-à-dire qu'elles accordent plus de crédits qu'elles n'ont de dépôts bancaires de leurs clients (ce procédé est très ancien -aussi vieux que l'activité bancaire-, rappelez-vous la naissance des premiers billets de banque fin 17ème siècle, lorsque les certificats de dépôt d'or se sont mis à circuler pour effectuer des règlements sans que leur conversion en or n'ait lieu).

 

Lorsqu'une banque accorde un crédit elle ne fait que créditer le compte du client qui emprunte de la somme correspondante = droit pour le client d'utilisation d'une certaine quantité de monnaie. Ce droit ne prive aucun autre agent.

 

Dans une économie simplifiée, avec une seule banque , le pouvoir de création mo paraît illimité. Rien n'empêche une banque de créer de la monnaie, sauf le risque de perte de confiance des titulaires de comptes. Dans la pratique il y a 3 contraintes à la création illimitée de monnaie par les banques de 2 nd rang : contrainte n° (1) il n'y a jamais une seule banque, or les unités monétaires des différentes banques ne sont pas identiques. Elles ont la même valeur, mais ne sont pas directement transférables. Lorsqu'une entreprise et son salarié n'ont pas leur compte dans la même banque, celle de l'entreprise doit se procurer des unités monétaires acceptées par celle du salarié : de la monnaie banque centrale (= base monétaire), sous forme de billets ou de monnaie scripturale. Cette contrainte vient limiter le pouvoir de création monétaire des banques. Cela constitue une fuite dans leur circuit mo. A cette limite liée à la multiplicité des banques, il faut rajouter des normes imposées par les autorités monétaires (les réserves obligatoires). Dans le cadre de la politique monétaire, pour contrôler la quantité de monnaie en circulation, les autorités monétaires obligent les banques commerciales à détenir des réserves, sous forme de monnaie banque centrale (coûteuse car non rémunérée). Chaque fois que les banques accordent des crédits, et créent par ce biais de la monnaie, elles doivent ainsi se procurer de la monnaie banque centrale pour maintenir le taux de réseves obligatoires. Cela représente un coût et peut les dissuader d'accorder trop facilement des crédits.

La valeur de la monnaie créée par la banque repose uniquement sur la confiance que les agents ont en son pouvoir d'achat et plus généralement sur la capacité de remboursement du débiteur. (banque sélectionne clients auxquels elle accorde un crédit, expertise évaluation risques / solvabilité).

Lorsque 2 agents de 2 banques différentes procèdent à un paiement, les unités monétaires des 2 banques sont différentes, même si elles ont un taux de conversion de 1 pour 1, les banques ne peuvent se payer entre elles que par l'intermédiaire de monnaie banque centrale. Les opérations concernant plusieurs banques se traduisent donc par des créances et des dettes entre banques. Elles doivent solder par une circulation de monnaie banque centrale sous forme de billets ou par l'intermédiaire des comptes que les banques commerciales ont l'obligation de détenir auprès de la banque centrale. Il serait très coûteux d'effectuer un règlement chaque fois que des agents mettent en présence plusieurs banques, elles attendent donc d'avoir des opérations en sens inverse afin d'effectuer des compensations : seuls les soldes sont réglés en monnaie BC (compensation = clearing) .

Lorsqu'une banque n'a pas assez de monnaie BC à sa disposition, elle doit s'en procurer, pour cela elle peut vendre des titres sur la marché mo ou acheter de la monnaie BC (se faire accorder un prêt par la BC sur son compte BC) (= refinancement bancaire).

Plus une banque accorde de crédits, plus elles créditent les comptes courants de ses clients, plus ceux-ci ont du pouvoir d'achat = dépenses, statistiquement une partie vers des agents d'autres banques, donc fuites, donc déficit de monnaie BC lors des compensations avec autres banques, donc achat de monnaie BC (a un coût : taux d'intérêt), ce coût se répercute sur la banque qui élèvera ses propres taux d'intérêt (ceux qu'elle demande aux clients auxquels elle accorde des prêts), d'où crédit plus cher d'où moins de demande de crédit = moins de dépôts = moins de fuites…

Même dans le cas d'une seule banque, contrainte n°(2)  ( contrainte de liquidité ) : Les banques doivent détenir un certain % de monnaie fiduciaire (pièces + billets) pour faire face aux retraits d'espèces de leurs clients (retraits aux Dab et guichets). Mais tous les agents (parce qu'ils ont confiance) ne demandent pas en même temps la conversion de leurs dépôts en billets. En plus les clients de la banque effectuent aussi des dépôts d'espèces auprès de leur banques (monnaie des commerçants, étrennes de noël …)

Fuites : soit les besoins d'espèces soit les règlements déficitaires lors de la compensation interbancaire = limites « naturelles » à la création mo des banques, auto-régulation.

Si pas suffisant : contrainte n°(3) ( l'open market, régulation indirecte par les quantités ) BC (banque de premier rang, banque des banques, pour l'€ : BCE) intervient sur le marché monétaire, celui où s'échange de la monnaie banque centrale (refinancement des banques de second rang). Les banques qui ont de la monnaie BC excédentaire, achètent des titres rémunérés, les banques en déficit de monnaie BC, vendent des titres en échange de monnaie BC.

La BCE intervient, si nécessaire sur le marché monétaire, pour assécher ou approvisionner le marché en monnaie BC selon le cas d'une trop forte création mo ou à l'inverse trop faible.

Si trop faible création mo = trop peu de crédits = trop peu de dépôts = trop peu de pouvoir d'achat (conso et invt) = ralentissement éco, dans ce cas là, la BC alimente le marché mo en monnaie BC, devient abondante, baisse taux d'intérêt (prix monnaie BC), achat bon marché = répercussion baisse taux d'intérêt pour les crédits octroyés aux clients (car concurrence entre banques). L'inverse si création mo trop élevée, risque d'inflation.

 

 

marjorie.galy@wanadoo.fr